L’intérêt que portent les Algériens à l’histoire de leur pays est loin d’être marginal. Pour le chercheur Fouad Soufi, historien affilié au Centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRASC), la connaissance historique joue un rôle fondamental dans la préservation de la mémoire nationale et la transmission aux générations montantes. Intervenant à l’occasion d’une rencontre sur l’histoire tenue au Cercle national des moudjahidine, il a insisté sur la nécessité d’élargir l’accès aux récits historiques.
Par Said Slimani
À ses yeux, les outils de vulgarisation comme les livres, les documentaires ou les émissions audiovisuelles sont essentiels pour que la population s’approprie son passé. Il a d’ailleurs salué le travail accompli par la chaîne nationale Edhakira, qu’il considère comme un exemple à suivre pour sa contribution à la sensibilisation historique.
Soufi réfute l’idée selon laquelle les jeunes seraient indifférents à l’histoire. Le succès croissant de certaines productions télévisuelles dédiées à la mémoire nationale en est, selon lui, une preuve claire. Il regrette toutefois que certains citoyens n’aient pas encore le réflexe de lire ou de s’informer via des débats critiques. C’est pourquoi il recommande que tout contenu sérieux et documenté sur le passé algérien soit rendu accessible au plus grand nombre.
Par ailleurs, il souligne que le métier d’historien, en Algérie comme ailleurs, repose sur une méthodologie rigoureuse. Cela implique de traiter les faits avec recul, objectivité et esprit critique – des compétences qui s’acquièrent dans le cadre universitaire. Dans ce sens, il déplore certaines lectures idéologisées de la colonisation française, notamment celles véhiculées par la droite politique en France.
Fouad Soufi accorde aussi une importance particulière au rôle des médias. Il estime que les journalistes participent activement à la vulgarisation historique et à la sensibilisation de toutes les tranches d’âge. Grâce à leur maîtrise de l’arabe et du français, les Algériens accèdent à une pluralité de sources, tant locales qu’internationales, qui enrichissent leur compréhension du passé.
Répondant à une interrogation sur la distinction entre mémoire et histoire, il a précisé que l’élaboration du récit historique n’est pas le monopole des historiens professionnels. Ce qui distingue ces derniers, c’est la rigueur méthodologique : l’usage de sources vérifiables, l’analyse critique des documents, l’évaluation des contextes. Mais il reconnaît que d’autres acteurs, notamment les anciens combattants, peuvent eux aussi produire des récits précieux sous forme de mémoires.
Enfin, il rappelle que l’histoire est un champ en perpétuel mouvement, nourri par la découverte de nouvelles archives, de témoignages inédits et de recherches approfondies. Cette dynamique contribue à faire évoluer la mémoire collective et à mieux appréhender les événements qui ont façonné l’Algérie contemporaine.
Ainsi, dans une société soucieuse de ses racines, la transmission du savoir historique apparaît comme un enjeu fondamental, non seulement pour comprendre le passé, mais aussi pour éclairer les choix du présent et les orientations futures.
S.S