En ce mois de juillet dédié à la célébration de l’indépendance, l’Algérie rend hommage aux martyrs et moudjahidines en réaffirmant son engagement à défendre la mémoire nationale et à documenter les crimes du colonialisme, non seulement sur son territoire, mais aussi à travers tout le continent africain.
Par Ikram Haou
C’est dans ce contexte que s’est tenu, les 1er et 2 juillet 2025, à l’hôtel El Aurassi, un colloque international placé sous le haut patronage du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, et organisé par le ministère des Moudjahidines et des Ayants droit. Intitulé « Les crimes du colonialisme dans l’histoire humaine : des blessures de la mémoire nationale à la nécessité de la justice historique », cet événement a réuni de nombreux universitaires, experts, chercheurs et diplomates algériens et étrangers.
Le forum a été supervisé par le ministre des Moudjahidines, M. Laïd Rebigua. Parmi les intervenants figuraient le Dr Hassan Maadoudi, professeur d’enseignement supérieur et responsable du Musée national ; la Dr Fadhila Alaoui, professeure à l’Université d’Alger 2 ; le Dr Omar Badraba, historien à l’Université de M’sila ; le Dr Rabah Laroussi, président du Conseil scientifique de la Faculté des sciences politiques et des relations internationales ; ainsi que le Dr Karim Rafouli, professeur à l’Université de Sétif 2. La présidence du forum a été assurée par la Dr Saïda Salama, elle-même intervenue aux côtés d’universitaires étrangers, dont un expert hongrois.
Les discussions ont porté sur les différentes dimensions du colonialisme – humaines, historiques, juridiques et politiques – l’Algérie étant présentée comme l’un des pays ayant le plus durement subi ses atrocités. Le Dr Rabah Laroussi a ouvert les débats avec une communication intitulée : « La Révolution du 1er Novembre 1954 et son impact sur les mouvements de libération en Afrique et dans le monde », affirmant que la lutte algérienne a constitué un modèle et un moteur pour de nombreux peuples en quête de liberté.
Le Dr Hassan Maadoudi a rappelé l’ampleur des crimes coloniaux tout en soulignant le rôle central de l’Algérie dans leur dénonciation. De son côté, la Dr Fadhila Alaoui a analysé les outils du démantèlement social et identitaire utilisés par le colonialisme français. Elle a insisté sur la nécessité de preuves historiques tangibles pour criminaliser officiellement ces actes, citant notamment les archives nationales spoliées par la puissance coloniale.
Le Dr Rachid Alloush, spécialiste des affaires stratégiques, a mis en lumière le poids du passé colonial dans les relations algéro-françaises. Selon lui, l’absence de reconnaissance des crimes perpétrés entrave tout rapprochement durable. Il a aussi plaidé pour une justice compensatoire intégrant les réparations matérielles, la dépollution des sites d’essais nucléaires et la mobilisation diplomatique pour obtenir des indemnisations, en coordination avec les pays africains. Il a conclu en affirmant que l’enjeu fondamental demeure la continuité de l’Algérie dans la voie de la vérité historique, bien au-delà des seules excuses officielles.
Les interventions ont été suivies d’un forum ouvert où d’autres invités ont pris la parole. L’ambassadeur de Palestine, Dr Fares Attia, a salué l’initiative algérienne, soulignant l’importance de transmettre l’esprit de la révolution algérienne au peuple palestinien, toujours victime d’oppression. Il a déploré le silence international sur les crimes commis contre les Palestiniens, allant jusqu’à évoquer l’inhumanité de la profanation des corps des victimes.
Le secrétaire général des travailleurs sahraouis, M. Nafi, a quant à lui réaffirmé la détermination du peuple sahraoui à obtenir son indépendance, s’inspirant des sacrifices algériens pour refuser tout statut de victime passive.
À l’issue des travaux, le forum a formulé onze recommandations majeures, parmi lesquelles :
- La création d’une unité de recherche dédiée à la documentation des crimes coloniaux au sein du Centre national d’études sur la Résistance, le Mouvement national et la Révolution de Novembre 1954.
- L’exploitation des médias numériques pour contrer le récit colonial et promouvoir une narration historique nationale.
- L’adaptation du droit national aux normes internationales criminalisant le colonialisme.
- L’inclusion des dégâts environnementaux, notamment liés aux essais nucléaires, dans les débats climatiques mondiaux.
- L’affirmation de la responsabilité conjointe des États et des individus dans les crimes coloniaux.
- La reconnaissance du droit des peuples palestinien et sahraoui à l’autodétermination comme impératif historique.
- La création d’un Forum du Sud global pour la justice géopolitique, à organiser par l’Algérie.
- La rédaction d’une charte internationale pour la justice historique et sa soumission à l’ONU et à l’Union africaine.
- L’établissement d’un forum afro-asiatique-sud-américain spécialisé dans les études coloniales, basé en Algérie.
- La promotion d’un cinéma géopolitique traitant des crimes coloniaux.
- La consolidation des mécanismes diplomatiques pour réclamer des réparations.
Dans son discours de clôture, le ministre Laïd Rebigua a remercié l’ensemble des participants pour la richesse des échanges et la qualité des travaux. Il a rappelé que la justice historique ne consiste pas à oublier, mais à honorer la mémoire, restaurer la dignité et résister aux falsifications. Il a salué la volonté du Président de la République, M.Abdelmadjid Tebboune d’inscrire la mémoire au cœur de la justice humaine et d’ouvrir une nouvelle page de lutte pacifique pour les droits historiques des peuples.
I.H